Quand lire c’est rire...

 

Qui a dit que les auteurs d’aujourd’hui ne nous faisaient plus rire ?

Personne et c’est tant mieux !

 

Le hasard vient de glisser sous mes yeux trois livres qui ont dégourdi mes zygomatiques. Un livre de poche, Le discours de Fabcaro, a même provoqué quelques francs fous rires sous la couette car cet Adrien, la quarantaine déprimée, imaginant des discours pour le mariage de sa sœur, plus absurdes les uns que les autres mais tous trahissant un parcours de vie, m’a émue aux larmes.

 

Puis vint L’amateur de billes de Bernard Ascal aux éditions Rhubarbe. J’avais déjà beaucoup apprécié le ton décapant du même auteur chez le même éditeur dans Un cul-de-sac dans le ciel. J’ai retrouvé son œil perçant les travers de la société dans les récits de L’amateur de billes. Les situations ont beau être loufoques, l’imaginaire débridé, les détails cocasses, l’art de nous transporter en quelques pages dans la peau d’un autre, pas toujours comme il faut, est d’une jubilation qui happe et décale notre regard au présent, sur le sens de nos petites manies et de nos petites vies. Comme dit le préfacier Claude-Louis Combet, l’hilarité est grinçante mais l’art du conteur jamais défaillant : « le temps a beau être sombre, le plaisir reste entier. » Et la cerise sur le gâteau est le travail de la langue, j’ai savouré nombre formules et raccourcis de pensée. Si philosopher peut se faire en collectionnant des billes, philosophons quitte à finir calot, tacot ou mieux bille de terre !

 

Enfin, n’allez pas croire qu’il n’y a que les hommes pour avoir la plume rieuse. Isabelle Flaten avec Ainsi sont-ils aux éditions du Réalgar est ma troisième cartouche. Pour ceux que la lecture de fragments effraie, ils n’y penseront déjà plus au bout de la deuxième page. Ils seront même ravis d’aviser des textes de longueur inégale et se laisser prendre à l’art de la chute. Dans ce livre, on ne sait jamais qui on rencontre au prochain tournant. Isabelle Flaten croque tous azimut un homme en prison, une mère en maison de retraite, une ado en colo, un couple qui se délite, autant de bouts d’histoires qui pourraient être des bouts de nous qui sommes comme eux. Car l’autrice fait semblant de nous louer pour mieux nous peindre à rebrousse poil.

« Peut-on vivre sans l’autre ? »

« Peut-on vivre avec l’autre ? »

Isabelle Flaten ne répond pas mais traverse elle aussi à grandes enjambées stimulantes les coulisses de la comédie humaine. Là encore, on philosophe sans en avoir l’air, avec tendresse et justesse.

 

Ces trois livres démontrent que le rire rend intelligent et Bedos n’aurait pas dit le contraire.

Alors, si vous croyez encore en parcourant les librairies et les bibliothèques, que toutes les nouveautés sont déprimantes, vous avez déjà trois références à dégainer !

 

MR